Les enfants soldats

La guerre 14-18 est présentée par la propagande française comme une défense de la population face à la barbarie et pour protéger l’avenir des enfants français. L’enfant est donc placé au centre de la propagande, mais en fait aussi les frais. Il sera même parfois directement engagé sur le front puisque, encouragé par l’esprit patriotique qui semble régner sur la France, certains adolescents s’engageront volontairement pour rejoindre les tranchées.

 La guerre, omniprésente même chez les enfants

La guerre est omniprésente à l’arrière, et notamment chez les enfants. En effet, à l’école on inculque souvent “le désir de vengeance et la haine  de l’ennemi” et la guerre est même utilisée comme support de cours[1] : on apprend à compter avec des munitions, on raconte le retour d’un père ou d’un frère en rédaction… même si il est interdit d’exprimer quelque défaitisme que ce soit ! [2]

Les magasins de jouets exploitent aussi le thème de la guerre: armes factices, différentes panoplies de l’armée française participent ainsi à entretenir “l’ardeur patriotique juvénile[3] et les enfants jouent ainsi “à la guerre”.

 

 

(reproductions de soldats français et allemands de la Première Guerre mondiale vendues dans les magasins à Rennes (1930). Coll.particulière J.P.Leray - MSTA)

(reproductions de soldats français et allemands de la Première Guerre mondiale vendues dans les magasins à Rennes (1930). Coll.particulière J.P.Leray – MSTA)

 

 L’engagement des “enfants / adolescents soldats”

Ardeur patriotique juvénile qui se concrétise  pour Victor Pichon, 14 ans, Jean-Corentin Carré, Paul Delalande (Rennais de 15 ans), Louis Dupuis (pas encore 14 ans)… Résultat de cette imprégnation quasi quotidienne de la guerre, quelques enfants partent au front, souvent sans en parler à leurs parents.

Sans titre 1

(Jean-Corentin Carré en uniforme – Musée de Bretagne)

Ces cas ne sont pas si rares que ça. Ils sont alors confrontés très jeunes à la guerre, même si ils sont souvent protégés des premières lignes par l’armée. Ce fut le cas de Paul Delalande et Louis Dupuis, montés au front mais écartés des premières lignes après deux semaines.

Photo extraite du Ouest-Eclair du 28 janvier 1915 consacré à 2 enfants soldats.

(Photo extraite du Ouest-Eclair du 28 janvier 1915 dans l’article consacré aux 2 enfants soldats)

Le plus connu de ces “adolescents-soldats”, comme l’historienne Manon Pignot, historienne spécialiste de l’expérience enfantine de la guerre et de la Première Guerre mondiale  préfère les appeler, fut Jean-Corentin Carré, engagé au 41ème RI de Rennes à 15 ans après avoir menti sur son âge et tué à 18 ans dans un mission d’aviation en 1918. Il devint un symbole de courage et de patriotisme.

 La propagande des journaux

En effet, les journaux s’emparent de ces affaires pour mettre en avant la bravoure de ces enfants soldats servant leur patrie : ainsi, l’Ouest-Eclair du 28 janvier 1915 consacre par exemple un glorieux portrait à Louis Dupuis et Paul Delalande.

Extrait article de Ouest-Eclair du 28 janvier 1915 sur 2 enfants soldats.

(Extrait article de Ouest-Eclair du 28 janvier 1915 consacré à Louis Dupuis et Paul Delalande)

Cependant, explique Manon Pignot , “le but du gouvernement, ce n’était pas que tous les enfants fuguent pour rejoindre le front, mais que chacun reste à sa place. La propagande de guerre va exploiter quelques figures d’enfant-héros pour dire : ‘Vous êtes un peuple intrinsèquement héroïque, vous les enfants de France. Mais votre héroïsme à vous, il faut le mettre en application à votre place, c’est-à-dire à l’arrière, en étant de bons élèves, de bons fils, de bonnes filles »

C’est peut être finalement cette nuance de la propagande qui a évité à de nombreux enfants de mourir sur le Front. Il semblerait en effet que ces enfants aient été assez impliqués dans cette guerre par la perte et l’absence de leurs proches, les privations et par l’embrigadement à l’école ou à l’église et même dans leurs loisirs pour ne pas avoir à subir d’eux mêmes l’horreur de la guerre.

 

Pour approfondir :

Les jeux et jouets de 1914 – 1918, Historial de la Grande Guerre: http://www.historial.org/Musee-collection/Collection/Collections-thematiques/Les-jeux-et-jouets-de-1914-1918

Webdocumentaire La grande guerre à travers les arts: http://guerre-14-18-arts.francetveducation.fr/#!/les-femmes-les-enfants/petits-soldats

(ressource intéressante puisque traitant de différents aspects de la guerre)

 

SOURCES

BEZIAT, Fabien , NANCY Hugues, Elles étaient en guerre, 2015. Documentaire.

Historial de la Grande Guerre. “Les enfants dans la Grande Guerre”. [En ligne].http://www.historial.org/Musee-collection/Collection/Collections-thematiques/Les-enfants-dans-la-Grande-Guerre

LAGADEC, Yann. Hommes et Femmes d’Ille-et-Vilaine dans la Grande Guerre : “Des enfants soldats”, Rennes : Co-édition Département d’Ille-et-Vilaine et Société Archéologique et Historique d’Ille-et-Vilaine, 2014. 978-2-86035-027-3.

TROUILLARD, Stéphanie. “Jean-Corentin Carré, enfant soldat et héros de la Grande Guerre”. France 24.[En ligne] 30/12/2104.http://www.france24.com/fr/20140501-premiere-guerre-mondiale-jean-corentin-carre-enfant-soldat-morbihan-bretagne-poilus

Pignot, Manon. « L’enfant soldat- XIXe-XXe siècle ». Armand Colin, 2012, 224 p.

 

[1] BEZIAT, Fabien , NANCY Hugues, Elles étaient en guerre, 2015. Documentaire.

[2] Ibidem

[3] Historial de la Grande Guerre. “Les enfants dans la Grande Guerre

[4] LAGADEC, Yann. Hommes et Femmes d’Ille-et-Vilaine dans la Grande Guerre : “Des enfants soldats”. p.68

[5] TROUILLARD, Stéphanie. “Jean-Corentin Carré, enfant soldat et héros de la Grande Guerre

[6] TROUILLARD, Stéphanie. “Jean-Corentin Carré, enfant soldat et héros de la Grande Guerre

 

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